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RDC : Les survivantes des violences sexuelles, premières victimes d’une crise humanitaire oubliée ?

RDC : Les survivantes des violences sexuelles, premières victimes d’une crise humanitaire oubliée ?

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RDC : Les survivantes des violences sexuelles, premières victimes d’une crise humanitaire oubliée ?

calendar_today 27 Mars 2025

Une survivante de violence sexuelle soutenue par UNFPA à l’est de la RDC
Une survivante de violence sexuelle soutenue par UNFPA à l’est de la RDC

Ils sont arrivés au milieu de la nuit. Ils ont pris ma fille et moi. Pendant des heures, nous avons subi l’indicible. Maintenant, ma fille a 14 ans et porte l’enfant de son bourreau. » Nadine (nom d’emprunt).

Depuis trois décennies, l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) est ravagé par un conflit prolongé où les femmes et les filles sont les premières victimes. Dans les zones sous contrôle des groupes armés, le viol, est une pratique de plus en plus utilisée pour humilier, terroriser et forcer les populations au déplacement.

En 2024, plus de 56 000 cas de VBG ont été rapportés dans la province du Nord-Kivu, reflétant une tendance à la hausse par rapport aux années précédentes. Les femmes et les filles déplacées sont particulièrement vulnérables, exposées à des risques accrus de violences sexuelles, d'exploitation et d'abus en raison de la précarité de leur situation et de l'absence de services de protection adéquats. Ces chiffres ne sont qu’une fraction de la réalité, car de nombreuses victimes ne signalent pas les violences sexuelles, par peur des représailles, de la stigmatisation ou de l’ignorance de l’existence des services de prise en charge.

La vulnérabilité des femmes dans les zones de retour et de déplacement atteint un seuil critique selon le rapport d’évaluation multisectorielle réalisée entre janvier et février 2025 et qui indique 210 cas de troubles psychosociaux signalés dans un seul centre de santé médical, traduisant l’ampleur des séquelles laissées par ces violences.

L’impunité reste une réalité accablante : peu d’auteurs de violences sexuelles sont poursuivis. La faiblesse du système judiciaire congolais et l’absence de protection pour les victimes découragent les plaintes, laissant les criminels libres de continuer leurs exactions.

J’ai seulement 14 ans et je porte un enfant de mon bourreau. Je n’arrive pas à me regarder dans un miroir sans ressentir de la honte…maintenant tout semble fini pour moi. Qui voudra encore de moi ? » s’interroge Sifa (nom d’emprunt), le regard perdu.

Effondrement des services de protection et de prise en charge des survivantes

Alors que les déplacés ont été forcés de retourner dans leurs villages, ils font face à un déficit des services sociaux de base qui ont été effondrés à la suite des conflits. L’accès aux soins et aux services de protection reste désespérément insuffisant, laissant un nombre alarmant de survivantes sans recours. L’évaluation rapide réalisée par les acteurs de protection dans les zones de retour comme Rutshuru, Nyiragongo et Minova a relevé une insécurité persistante et un manque de protection ; 91 % des communautés ne disposent d’aucun espace sécurisé pour les femmes et les filles ; 75 % des zones de retour n’offrent aucun service spécialisé pour les survivantes de violences sexuelles. Les femmes et les filles restent extrêmement vulnérables dans ces zones, dans les sites de déplacés, dans les familles d'accueil ou encore dans les villages en reconstruction ; Une situation qui les rend encore plus vulnérables aux violences basées sur le genre. 80 % d’entre elles sont menacées lors de leurs déplacements, et 70 % subissent des agressions lorsqu’elles se déplacent pour ramasser du bois.

Au Nord-Kivu, seuls trois hôpitaux à Goma peuvent encore accueillir les victimes. Le pillage des stocks humanitaires, notamment l’entrepôt du PAM où étaient stockés les produits de santé de la reproduction pour le compte de UNFPA à Goma, prive les structures de santé des kits post-viol et des antibiotiques mais surtout, augmente les risques d’infections et de grossesses non désirées.

Nous avons vu une adolescente arriver en état de choc. Elle ne parlait pas. Après plusieurs heures, elle nous a confié avoir été violée par trois hommes armés. Elle saignait encore, mais nous n’avions presque plus de médicaments pour la soigner. » Témoigne Patience, une sage-femme exerçant à Goma avec l’appui de UNFPA

Le manque des services spécialisés constitue un défi important que la communauté humanitaire doit relever pour sauver les vies dans les zones de retour.

18 millions de dollars pour une réponse intégrée en santé sexuelle et la lutte contre les VBG

Une sage-femme en pleine sensibilisation au Nord-Kivu dans le contexte de crise
Une sage-femme en pleine sensibilisation au Nord-Kivu dans le contexte de crise

Face à cette catastrophe humanitaire, UNFPA appelle à une réponse immédiate et renforcée.

UNFPA lance un appel urgent de 18 millions de dollars pour renforcer ses services intégrés de santé reproductive et de lutte contre la violence basée sur le genre afin de faire face à l’escalade de la crise en RDC. » lit-on dans un communiqué officiel du 21 février 2025.

Cet appel au financement permettrait de renforcer la prise en charge médicale et psychologique, d’ouvrir de nouveaux espaces sécurisés pour les survivantes, et d’améliorer l’accès aux services juridiques pour lutter contre l’impunité des auteurs de violences.

Dans la foulée, UNFPA et ses partenaires ont déployé du personnel médical notamment des sages-femmes et des agents de santé communautaire pour rapprocher les soins des survivantes de violences sexuelles et renforcer la prise en charge psychosociale des femmes et filles traumatisées dans les zones de retour et familles d'accueil. Ceci grâce à l’appui financier du Gouvernement Britannique à travers le Foreign, Commonwealth & Development Office (FCDO), pour la mise en oeuvre du projet « Réponse d’urgence et renforcement des systèmes de santé pour améliorer les services de santé sexuelle et reproductive sensibles au genre ».

Grâce à une coordination renforcée sous son leadership et ce malgré le contexte sécuritaire toujours critique, UNFPA s’assure que les survivantes accèdent à une prise en charge holistique de qualité, accèdent aux informations sur les services disponibles à travers un circuit de référencement mis à jour hebdomadairement en vue d’apporter une assistance rapide, sûre et de qualité aux survivantes, tout en prenant en compte leurs besoins spécifiques. Toutefois, les besoins restent immenses et le financement humanitaire peine à suiv