Il était 5 heures du matin, nous étions à deux lorsque nous sommes allés dans la forêt pour acheter du charbon de bois. Nous avons rencontré cinq hommes armés sur notre chemin qui nous ont d’abord ravi tout l’argent avant de nous prendre de force et nous ont violées ». raconte Jeannette Kikanda (nom d’emprunt) lors d’une thérapie individuelle organisée par UNFPA.
En République Démocratique du Congo (RDC), les conflits armés entraînent de graves souffrances pour les populations affectées sur le plan psychologique et social. Les conséquences de ces situations humanitaires d’urgence peuvent sembler dramatiques à court terme, mais elles portent atteinte à la santé mentale, sexuelle et reproductive des femmes et au bien-être physique et psychosocial des populations victimes à long terme.
A qui appartient la grossesse ?
Jeannette Kikanda a vu son mari la quitter après avoir été victime de viol collectif à Kitshanga et vit seule avec les enfants dans le site de déplacés de Bujari en territoire de Nyiragongo où elle a trouvé refuge à cause de la guerre du M23. Enceinte de 6 mois, Jeannette ne sait pas à qui appartient la grossesse qu’elle porte et cela l’affecte.
C’est seulement après avoir informé mon mari du viol dont j’ai été victime qu’il a décidé de me quitter un mois après. A dire vrai, je ne sais pas si cette grossesse est de mon mari ou des violeurs. J’ai les larmes aux yeux à chaque fois que j’y pense » s’est-elle exprimée avec tristesse devant le prestataire chargé de santé mentale et soutien psychosocial de UNFPA.
Soigner les esprits pour restaurer la dignité et la santé mentale de survivants
Si Jeannette a été exposée aux risques de violences sexuelles accrus dans les zones en proie aux groupes armés, il est évident que les effets néfastes à la santé mentale, physique et sexuelle et reproductive soient imminents avec comme conséquence la baisse d’estime et de confiance en soi, qui risque de développer de troubles psychologiques et de stress lié au viol, dû au départ de son mari et au contexte.
Voilà pourquoi le Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA) et ses partenaires dont ICAHD International (Initiatives de Coopération et d’Appui aux Actions Humanitaires et de Développement) et Heal Africa ont intensifié les efforts, en vue de faire face aux effets néfastes des conflits comme la santé mentale, sexuelle et reproductive des survivantes à l’Est de la RDC. Ceci, dans le cadre de la mise en œuvre du projet « Amélioration de la prévention et réponse holistique aux VBG et EAS dans les territoires affectés par les crises humanitaires dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri » grâce au financement du fonds CERF.
Le projet été mis en oeuvre pendant 9 mois dans 4 zones de santé (Nord-Kivu : Nyiragongo, Rutshuru et Rwanguba, Ituri : Komanda), entre septembre 2022 et juin 2023 en vue d’améliorer l’accès aux services de prévention et de réponse holistique aux VBG et à la prévention de l'exploitation et des abus sexuels en faveur des populations affectées par la crise. C’est dans ce cadre que Jeannette Kikanda a été reçue par les équipes de UNFPA et ses partenaires pour une prise en charge holistique.
Fournir des services spécialisés pour aider les victimes
Pour assurer le bien-être et la santé mentale et psychosociale des survivantes, UNFPA et ses partenaires ont pris des mesures visant à améliorer la disponibilité et la qualité des services dédiés aux survivantes de violences basées sur le genre et des exploitations et abus sexuels.
Au titre des résultats, 1 685 survivant-e-s de VBG ont bénéficié de l’appui du projet y compris la prise en charge médicale et psychosociale. Aussi, 2 347 kits de dignité pré-positionnés dans les formations sanitaires et les espaces sûrs ont été distribués progressivement aux bénéficiaires.
En outre, 662 femmes et filles des communautés hôtes ont bénéficié des informations et des activités qui favorisent leur rétablissement, bien-être et autonomisation dans les Espaces sûrs mis en place.
14 386 personnes sensibilisées sur différentes thématiques centrées sur les VBG/EAS notamment, les concepts clés de VBG, les rôles et responsabilités de communautés sur la protection des femmes et filles ainsi que la disponibilité des services. Il faut ajouter la notion de nécessité d’utiliser les services dans les 72H ou mieux 3 jours de l’incident. Ces activités ont été appuyées par des relais communautaires, des animateurs locaux et des membres de mécanismes de gestion de plaintes, à travers les séances de sensibilisation communautaires, les radios communautaires et les campagnes de masse.
Deux cent quarante prestataires de services et acteurs de base ont été formés (80 Agents psychosociaux, 80 prestataires de santé, 40 autorités administratives-traditionnelles et leaders, 40 membres de réseaux communautaires de protection) sur la prévention aux VBG/EAS et l’offre de services holistiques aux bénéficiaires du projet.
Notons que UNFPA coordonne les interventions de réponse et prévention y compris la mitigation des risques de VBG, et il a été donc prioritaire pour l’organisation d’assurer aux victimes de VBG et EAS un accès à une assistance de qualité.