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Pour Adolphine Mputu, ses objectifs de la vie sont le travail, la réussite, le bonheur. Un rêve qu’elle aura du mal à voir se réaliser car quelques jours seulement après l’accouchement de son premier enfant, elle a été touchée par une incontinence des selles et des urines.

Pour moi, c’était quelque chose d’anormale ; évacuer les selles et les urines par la voie vaginale. J’en avais parlé à mon mari et nous nous sommes rendus à l’hôpital. Mais le médecin m’avait juste prescrit quelques antibiotiques et m’a laissée rentrer à la maison », se souvient- elle avec amertume.

Les faits se sont passés il y a une douzaine d’années ; elle avait perdu tout espoir de survivre à ce mal qui a contraint son époux à construire une case à part, loin des autres habitants du village. Adolphine et son époux vivaient en territoire de Kazumba dans le Kasaï –central. Une province située au centre de la République Démocratique du Congo. Et lorsqu’elle raconte son histoire, Adolphine s’en souvient comme si c’était hier.

Lors de ma première consultation, les médecins m’ont dit que mon cas était assez compliqué, et qu’il me fallait beaucoup d’argents pour être transférée à Kinshasa pour y être opérée. Faute d’argent, j’ai supporté cette souffrance pendant des années. Il m’était toujours difficile de contrôler mes urines et les selles qui ne cessaient de sortir par le même canal. Je dégageais une odeur insupportable. Je me sentais impropre et j’avais choisi de vivre dans la solitude pour éviter les regards inquisiteurs des gens du village. Sous-estimée et malheureuse à cause de ma situation, je sentais une profonde tristesse tout au fonds de moi ncar mes voisins du village affirmaient que ce que je vivais était une malédiction », nous confie-t-elle d’une voix enrouée en laissant couler quelques larmes de ses yeux.

En effet, Adolphine Mputu a souffert d’une fistule vesico-recto-vaginale : Une anomalie grave qui survient lors d’un accouchement avec complications. Il s’agit d’une communication entre la vessie et la voie génitale et le rectum, due à un travail d’accouchement prolongé en l’absence de soins obstétricaux de qualité. Elle provoque une fuite d’urine ou de matières fécales par le vagin, et entraîne à plus long terme des problèmes médicaux chroniques.


Adolphine Mputu en pleine consultation médicale

En République démocratique du Congo, depuis le lancement de la campagne pour l’élimination de la fistule obstétricale en 2006, le Fonds de Nations Unies pour la Population UNFPA, organise chaque année des campanes de réparation gratuite de la fistule obstétricale dans certains Hôpitaux du pays.  Cette fois-ci c’était à l’hôpital saint – Georges de Kananga où des médecins spécialistes venus de Kinshasa ont offert des services de traitement de la     fistule obstétricale et une réintégration socio-économique grâce à laquelle, Adolphine a recouvert sa santé et sa dignité.

Pour se rendre plus utile à sa communauté et poursuivre son rêve, Adolphe a choisi de retourner dans son village et après une période de formation professionnelle, elle est devenue enseignante du primaire dans une école publique du village. Une façon dit-elle de, contribuer au développement de sa communauté. 

 J’avais quitté mon village situé à une quarantaine de kilomètres de Kananga, j’ai été opérée gratuitement par Docteur Dolores Nembuzu et depuis, je n’ai plus honte, j’ai retrouvé ma féminité. »

 


Adolphine Mputu entouré par ses élèves

Depuis 2006 plus de 15.000 femmes ont bénéficié gratuitement des soins chirurgicaux pour la réparation de la fistule obstétricale et elles ont été réinsérées dans la société grâce à l’appui financier de UNFPA et d’autres partenaires du Gouvernement. Pour éliminer ce fléau, le Fonds des nations Unies pour la population travaille au côté de gouvernement Congolais dans la capacitation des sages-femmes pour répondre aux complications des accouchements,  dans la dotation des formations sanitaires en équipements nécessaires et dans la  formation de leurs équipes chirurgicales en vue de continuer localement les interventions afin  de lutter contre la fistule obstétricale et éviter le manque de soins appropriés dont Adolphine a été victime  pendant longtemps.

Guérie de la fistule, Adolphine est presque devenue une ambassadrice. En dehors de ses heures de cours, elle sensibilise les femmes au danger d’une grossesse non suivie par le personnel de santé qualifié. Elle fait du porte à porte pour informer les femmes et les jeunes filles sur les avantages de la consultation prénatale. Même à ses élèves, Adolphine trouve du temps pour parler de la fistule obstétricale et insiste sur le fait que la fistule n’est pas une malédiction, elle est évitable et guérissable.                                                                                                          

                                                                                                            Par Junior Mayindu