Dans le camp de Rusayo, les premiers bruits de la vie réveillent lentement les lieux. Seraya (nom d’emprunt), s'active, allume le feu à l’espace sûr du camp, non loin de la clinique mobile. Elle prépare une simulation de confection de beignets dans le cadre d’une session d’apprentissage en pâtisserie organisée par l’ONG ActionAID avec l’appui technique de UNFPA. Avec son bébé bien attaché au dos et un petit sac de farine posé à ses côtés, elle montre aux autres femmes et filles déplacées comment mélanger les ingrédients. Pour elle, cette activité n’est pas seulement une formation : c’est un symbole d’espoir et de résilience après un exode douloureux vers l’inconnu suite à la reprise des combats violents dans l’est de la RDC.
En février 2024, la vie de Seraya bascule. La guerre éclate à Mweso, forçant des milliers de familles à fuir.
Nous avons marché sans savoir où aller. Mon mari était au champ, et je ne pouvais pas le joindre. Beaucoup de femmes perdaient leurs enfants en chemin. Moi, je serais les miens contre moi pour ne pas les perdre », raconte-t-elle, les yeux empreints de tristesse.
Enceinte de trois mois, Seraya entreprend un périple de sept jours à pied avec ses enfants, traversant Rutshuru et Kibumba avant d’atteindre le camp de Rusayo, près de Goma. Elle arrive épuisée, laissant derrière elle une maison et une vie. Trois mois plus tard, son mari les rejoint grâce à un service d’appels gratuit offert par la Croix-Rouge, réunissant des familles déchirées par le conflit. Cependant, la survie reste difficile.
Une stabilité fragile au camp de Rusayo
À Rusayo, Seraya et sa famille tentent de reconstruire une vie. Après deux mois passés dans un hangar surpeuplé, ils reçoivent des bâches pour construire une hutte. Comme beaucoup de femmes, Seraya se rend dans le Parc de Virunga pour récolter des branches d’arbres afin de renforcer leur abri. C’est là qu’elle vit l’une des expériences les plus traumatisantes de sa vie : des hommes armés attaquent son groupe, et trois femmes sont violées sous ses yeux. Elle s’échappe de justesse, et va trouver refuge à la clinique mobile de UNFPA présente dans le camp.
La clinique mobile et l’espace sûr de Rusayo, misent en place par UNFPA en partenariat avec ActionAid, deviennent un refuge crucial pour Seraya et son amie Jeanne Kabuo.
Nous avons reçu les survivantes dans un état critique. Seraya était enceinte, mais sa grossesse était stable. Nous avons prodigué des soins immédiats et les avons orientées vers l’espace sûr pour un soutien psychologique.» se souvient la sage-femme responsable de la clinique mobile .
Une renaissance à travers la pâtisserie
Après des semaines de formation, Seraya excelle dans la préparation de beignets, qu’elle vend dans le camp. « Cela m’occupe, me donne de la force et m’aide à gagner de l’argent pour mes enfants. Grâce à cela, je reprends confiance en moi,» confie-t-elle avec un sourire timide.
Avec le soutien de UNFPA et de l’Union Européenne, Seraya et son mari reçoivent également des conseils en planification familiale. « Je ne veux plus continuer à donner naissance dans ces conditions. Nous avons appris à planifier notre avenir,» affirme-t-elle.
Dans l’est de la RDC, les espaces sûrs transcendent leur rôle de simples refuges. Ils offrent des soins psychologiques immédiats aux survivantes de violences sexuelles et basées sur le genre (VBG), des formations pratiques pour une autonomie économique. Pour des femmes comme Seraya, ces espaces sont une bouée de sauvetage.
Ici, nous retrouvons plus qu’un refuge : nous retrouvons notre dignité », ajoute-elle.
Son histoire illustre l’impact vital du travail de UNFPA et de ses partenaires dans la réponse aux crises qui frappent cette partie de la RDC. Cependant, le besoin d’étendre ces services demeure pressant, car le nombre d’espaces sûrs reste insuffisant face à l’afflux constant de déplacés. Un soutien financier reste crucial pour poursuivre cette mission d’espoir et de résilience.