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Sabine AWEZAYE, 30 ans, habitant dans le camp des déplacés de Kikumbe à Kalemie s’est mariée à l’âge de 15 ans pour subvenir aux besoins de ses frères et sœurs.  Ainée d’une famille de 5 enfants, Sabine qui ne pouvait pas aller à l’école, a commencé à travailler à l’âge de 11 ans pour prendre en charge ses deux frères et deux sœurs.

Sabine, le corps frêle et un visage exprimant le courage ainsi que la détermination à se battre contre le mariage d’enfants dira :

« à la mort  de mes parents, j’ai dû abandonner l’école pour survivre et prendre soin de mes frères, j’allais puiser de l’eau pour vendre, faire la lessive dans des différentes maisons pour gagner de l’argent jusqu’à ce qu’un jour, je rencontre un homme qui m’a mise enceinte.  Mon espoir de sortir mes frères et sœurs et moi de l’engrenage de la misère, s’est viré en un cauchemar. Quand j’ai accepté d’épouser cet homme qui volontairement s’était proposé de nous aider en subvenant aux besoins de mes petits frères et sœurs et moi, je m « engageais ainsi dans un mariage alors que je n’avais que 15 ans ».

Dix-huit ans est l’âge légal en République Démocratique du Congo (RDC) pour contracter le mariage. Mais chaque année, suite à la pauvreté, aux conflits, aux catastrophes humanitaires, plusieurs familles se trouvent dans l’incapacité de scolariser leurs enfants. Ce qui pousse plusieurs adolescentes au mariage précoce et ou forcé, violant ainsi l’âge légal au mariage. Cette situation est une violation des droits des enfants et les privent de la possibilité de réaliser leurs rêves.  

A Kalemie, la pauvreté et le mouvement de population dû aux conflits inter communautaire sont à la base de plusieurs mariages précoces ou forcés. Le mariage précoce est souvent le résultat de grossesses non désirées, qui font courir un risque considérable pour la santé de la jeune fille. Grâce à une bonne prise en charge médicale le bébé de Sabine est venu au monde. « J’ai conçu, mon premier enfant, mais j’avais un petit bassin qui n’était pas capable de supporter un bébé vu mon âge, j’ai ainsi été opérée».

Le mariage précoce maintient les adolescentes dans l’impuissance totale. « J’ai connu beaucoup de difficultés dans mon mariage. Mon mari me battait et m’humiliait. Je voyais, impuissante, mes frères et sœurs, s’adonner à des activités dégradantes pour survivre. Je regrette tellement…. J’aurais voulu que mes parents soient encore là. »

Sabine avoue que « toute cette souffrance qu’elle a connue lui a rendue non seulement plus forte mais aussi sensible à la souffrance des autres qui comme elle sont des victimes de ce problème de mariage précoce. « Ce qui m’est arrivé, m’a donné le courage, de me lever et de rejoindre d’autre femmes qui organisaient des sessions de sensibilisation pour informer et accompagner les filles victimes du mariage précoce dans mon quartier ». Depuis son divorce avec son mari, Sabine est devenue membre active de l’Association pour la Promotion et l’Eveil de la Femme en sigle APEF, une association partenaire de UNFPA qui a pour mission de contribuer à la promotion et l’éveil de la femme et fournir une prise en charge psychologique aux femmes victimes de VBG.


Sabine parle des méfaits du mariage précoce 

Aujourd’hui, elle est fière de lutter pour que les jeunes filles de Kalemie dans la province de Tanganyika soient informées des dangers du mariage précoce. Ensemble, elles organisent des sessions de formations auprès des jeunes filles, des mères et souvent auprès des maris pour discuter avec eux et les informer sur les méfaits que le mariage et la grossesse précoce peuvent engendrer sur l’enfance et l’avenir de leurs jeunes filles.

Mon histoire prouve que faire la sensibilisation des jeunes filles et femmes victimes de mariages et grossesses précoces est le remède au fléau que représentent le mariage et la grossesse précoce.

« J’encourage les jeunes filles à dire non au mariage précoce. Cela détruit les vies, détruit l’avenir  des jeunes filles et les rendent fortement dépendantes, de leur bourreau ».  Nous les filles, les femmes, nous sommes toutes concernées par le mariage et grossesse précoces.  J’invite les maris, les mères, à encourager les adolescents à privilégier les études».