Je suis tombée enceinte pour la première fois à 26 ans. Après l’accouchement, j’ai perdu mon bébé... et ma vie a basculé. J’ai commencé à perdre les urines sans m’en rendre compte. Aujourd’hui, j’ai 56 ans. Pendant 30 ans, j’ai vécu dans la honte, le rejet, et le silence. »
À l’hôpital HEAL Africa de Goma où nous l’avons retrouvée, Charlotte Sibwanomi n’a plus les larmes d’une femme meurtrie. Elle a retrouvé le sourire d’une survivante. Après trois décennies de souffrance due à une fistule obstétricale, elle a été opérée gratuitement grâce au soutien de UNFPA.
Les gens m’évitaient à cause des odeurs. J’ai été abandonnée, rejetée. Je ne pensais pas guérir un jour. Que Dieu bénisse tous ceux qui ont contribué à ma guérison » dit-elle, avant beaucoup d’émotions.
En République Démocratique du Congo (RDC), où l’accès aux soins maternels reste inégal, cette maladie continue de priver des milliers de femmes de leur dignité. Rejetées par leurs proches, souvent sans informations sur les moyens d’accéder au traitement, beaucoup de femmes atteintes de la fistule vivent dans l’isolement pendant des années.
Une guérison qui redonne la parole
C’est une maladie invalidante qui pousse les femmes à s’isoler. Grâce aux fonds reçus de UNFPA, nous avons pu soigner 20 femmes ici à Goma. Nous ne réparons pas seulement un organe. Nous restaurons toute une dignité,» explique Dr Esther Kitambala, assistante au programme à HEAL Africa.
Mahombi Tuagane, une autre survivante récemment opérée, témoigne : « C’est une amie qui m’a convaincue de venir ici. L’opération s’est bien passée, et les infirmiers nous soignent avec bienveillance. Les médicaments sont gratuits, cela aide beaucoup pendant la convalescence.»
En 2024, près de 1 000 femmes ont bénéficié d’interventions réparatrices soutenues par UNFPA en RDC. Mais le combat est loin d’être terminé. Selon les estimations, au moins 500 000 femmes et filles vivent encore avec une fistule obstétricale alors que la maladie est évitable.
L’histoire de Charlotte est un cri d’espoir, mais aussi un appel à la responsabilité collective. Car derrière chaque cas de fistule obstétricale, il y a une femme qui a donné la vie, souvent dans des conditions extrêmes, et qui n’a reçu ni soins, ni soutien et généralement perd son bébé. Lutter contre la fistule obstétricale, c’est défendre le droit fondamental de chaque femme à accoucher dans la sécurité et la dignité.
Une tragédie évitable qui appelle à l’action
Cette tragédie a aussi comme source, les inégalités d’accès aux soins de santé, les accouchements non assistés, la pauvreté extrême, et les conflits qui forcent les femmes à accoucher sans assistance médicale, dans des conditions déplorables.
Grâce au soutien de ses partenaires, UNFPA agit sur tous les fronts : renforcement des capacités des structures de santé, formation des prestataires, mobilisation communautaire, sensibilisation et surtout, prise en charge gratuite des interventions chirurgicales en vue d’éradiquer la fistule.
En outre, UNFPA s’efforce à restaurer la confiance, la dignité et la place de chaque survivante au sein de sa communauté. Car au-delà de la souffrance physique, la fistule obstétricale plonge les femmes dans une exclusion sociale, parfois irréversible. En guérissant, elles retrouvent non seulement leur corps, mais aussi leur voix, leur rôle, leur humanité.