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Ces derniers temps, lorsque je tombe enceinte, je suis malade, je n’arrive pas à travailler et j’ai des difficultés pour nourrir ma famille ».  

Ainsi s’exprimait Nsenga Malu, une femme robuste au regard vif, assise au milieu de la cour devant la maison de deux pièces qui sert de toit pour les 13 personnes de sa famille (son mari, ses 9 enfants, ses deux petits-enfants et elle-même).

Derrière le regard de cette femme dont l’âge est estimé à 35 ans, se cache une vie pleine de péripétie. Mariée à l’âge de 15 ans, alors qu’elle n’avait pas encore terminée son adolescence, elle a eu son premier enfant juste après le mariage. Après, ce premier enfant, suivront 7 autres. C’est en ce moment qu’elle et son mari, avec leurs enfants quittent la République Démocratique du Congo (RDC) pour l’Angola, à la recherche de la « pierre rare », le diamant. Pour elle et son mari, il fallait se battre pour assurer la vie des 8 enfants qu’ils avaient.  Ces enfants qui sont venus au monde sur une période de 13 ans. Depuis qu’elle est dans sa vie conjugale, Nsenga Malu est enceinte en moyenne 11 mois après chaque accouchement. Ce qui veut dire qu’elle portait chaque fois une grossesse pendant qu’elle s’occupait d’un bébé. En Angola, pendant que son mari s’adonnait à la recherche du diamant, elle exerçait un petit commerce pour le soutenir dans les dépenses quotidiennes de la famille.

Le retour brusque et forcé au pays

Mais voilà soudainement que leur destin va basculer.  Ils sont arrêtés par les forces de l’ordre angolaises et refoulés de force dans leur pays d’origine, la RDC. Elle arrive dans son pays natal, par Kamako au Kasaï avec ses enfants et son mari et doit réapprendre à vivre car ils se sont installé à Luambo au Kasaï central sans ressources matérielles et financières. La famille a été soutenue par des proches, qui malgré la modicité des moyens ont décidé de leur donner la maison qu’ils occupent actuellement ; une maison de 2 pièces pour 13 personnes. Le retour en RDC a été très difficile pour Nsenga Malu car elle portait au moment de l’expulsion, une grossesse.  Quelques mois après, leur arrivé à Luambo, elle donnera naissance au neuvième enfant de la famille.


Nsenga Malu dans la cour de sa maison

Les congolais émigrés en Angola reviennent régulièrement de ce pays dans des conditions difficiles. En 2021, du début de l’année au 6 septembre, au seul poste frontalier de Kalamba Mbuji, il a été enregistré plus de 800 personnes revenues de force d’Angola. Outre ce poste, de nombreux congolais, tout comme Nsenga Malu sont expulsés à partir de Kamako dans la province du Kasaï. En septembre dernier, les autorités frontalières avaient enregistré à ce poste d’entrée environ 3 141 personnes.  Beaucoup de ces refoulés sont des femmes. Elles arrivent généralement démunies et doivent recommencer à construire à nouveau leur vie. Ces femmes, pour leur majorité ont un profil similaire à celle de Nsenga Malu.

La planification familiale comme une réponse

Après la naissance de son neuvième enfant, elle a été prise en charge au centre de santé de Luambo, une structure sanitaire appuyée par UNFPA dans le cadre de son programme de réponse humanitaire en RDC. Pour faire face à toutes les difficultés que les nombreuses grossesses et très rapprochées lui posaient, depuis l’âge de 15 ans, car mariée très précocement, elle se confie à Irene Kunda, l’Infirmière Titulaire qui lui donnera des conseils. Nsenga Malu, décide alors d’adopter une méthode de contraception pour planifier la naissance de ses enfants. Grâce à l’appui de UNFPA, à travers le fonds humanitaire, elle a bénéficié de kit de dignité et d’un accompagnement pour la méthode moderne de contraception.


Nsenga Malu, avec l’infirmière titulaire Irène Kunda, en counseling sur la planification familiale

Nsenga Malu, avec l’infirmière titulaire Irène Kunda, en counseling sur la planification familiale

A la question de savoir pourquoi, elle ne pratiquait pas la planification familiale, elle répondra :

je ne savais pas que c’était possible d’organiser la naissance des enfants. Je n’ai jamais reçu ce type d’informations ».

Tout comme elle, de nombreuses femmes et filles de la province du Kasaï Central n’ont reçu aucune information sur la contraception et la planification familiale. Cette situation a pour conséquence la fécondité élevée qui dépasse facilement 7 enfants par femme.

La reconstruction de sa vie

Nsenga Malu, essaie de se reconstruire à travers l’agriculture et la vente du bois de chauffe qu’elle va chercher en brousse. Avec le revenu qu’elle tire de ces deux activités, elle arrive difficilement à assurer la pitance quotidienne de sa famille. La planification familiale l’aide en cela pour éviter d’augmenter le nombre de bouches à nourrir surtout qu’elle a beaucoup de peine pour assurer le quotidien. Avec beaucoup de conviction, elle nous dira :

la contraception me permet d’éviter de tomber malade. Si je tombe encore enceinte, les enfants n’auront pas à manger ».

C’est ainsi qu’elle a décidé de se battre pour assurer la survie de sa famille.


Nsenga Malu, de retour à la maison avec du bois qu’elle commercialise

 

UNFPA en 2020 et 2021 a bénéficié de l’appui du Fonds humanitaire pour intervenir dans les provinces du Kasaï-central, du Kasaï, du Sankuru et du Kasaï oriental. Cet appui permet de prendre en compte la santé de la reproduction y compris la Planification Familiale, les soins de santé primaire et la prévention et la prise en charge des violences basées sur le genre. C’est grâce à cet appui que UNFPA a travaillé avec son partenaire Caritas Kananga pour assurer la prise en charge de cette femme.

 

Siaka N. TRAORE

Spécialiste Communication