Go Back Go Back
Go Back Go Back

Loti Kubuya Mielor, fier d’exercer comme sage-femme pour sauver des vies

Loti Kubuya Mielor, fier d’exercer comme sage-femme pour sauver des vies

Actualités

Loti Kubuya Mielor, fier d’exercer comme sage-femme pour sauver des vies

calendar_today 26 Mars 2025

Mielor en consultation d'une femme déplacée
Mielor en consultation d'une femme déplacée

On me demande souvent pourquoi j’ai choisi ce métier de sage-femme. Ma réponse est toujours la même : parce que donner la vie est un acte sacré, et chacun doit pouvoir y contribuer. »

Que ce soit dans les cliniques mobiles ou à l’Hôpital Général de Virunga à Goma, Loti Kubuya Mielor veille sur les patientes aux côtés de ses collègues sages-femmes. Il est l’un des rares hommes à exercer cette profession dans la province du Nord-Kivu, un territoire marqué par les conflits et les déplacements de populations.

Né en 2000 à Shasha (Masisi), Loti a grandi dans un environnement où les inégalités de genre dictent les rôles sociaux. Pourtant, très jeune, il s’est intéressé à la santé maternelle. Formé comme sage-femme à l’Institut Technique Médical (ITM) Kirotshe entre 2018 et 2022, Loti fait actuellement sa spécialisation dans la même filière à l’Institut Supérieur des Techniques Médicales (ISTM) Grand-Lac de Goma. Déterminé à perfectionner ses compétences, il s’est engagé auprès des populations vulnérables, notamment dans les camps de déplacés internes du Nord-Kivu.

Loti a commencé sa mission humanitaire dans les cliniques mobiles soutenues par UNFPA, où il offrait des soins aux femmes enceintes et aux survivantes de violences sexuelles dans les camps de déplacés comme Sam Sam, Shabindu Kashaka, Lushagala et Kanyaruchinya. Mais c’est à Lushagala, un site des déplacés démantelé en février 2025, que son engagement a pris une dimension encore plus forte. Loti était le seul homme sage-femme à Lushagala. Dans ce camp surpeuplé du quartier Mugunga dans la périphérie de la ville de Goma, les accouchements avaient lieu à la clinique mobile de UNFPA,  sous des tentes et souvent, pendant les détonations des bombes.

Un sage-femme présent même au cœur du chaos

Loti administrant une méthode contraceptive à une femme retournée
Loti Mielor administrant une méthode contraceptive à une femme 

Mariam, une femme déplacée de 28 ans, se souvient encore du jour où Loti lui a sauvé la vie :

J’étais enceinte de huit mois lorsque j’ai commencé à saigner abondamment. Il n’y avait pas de médecin, pas d’ambulance pour m’évacuer. J’étais sûre que j’allais mourir avec mon bébé. Mais Loti était là. Il a pris les choses en main, a stoppé l’hémorragie et m’a encouragée à tenir bon. Grâce à lui, mon fils est en vie. »

Des situations que Loti a vécu une dizaine de fois. Des naissances en urgence, des femmes arrivant après des jours de marche, des mères en détresse ayant tout perdu à cause du conflit.

Je fais souvent avec ce que j’ai. Parfois, une lampe torche pour éclairer l’espace quand c’est la nuit. Improviser un lit d’accouchement avec des sacs de riz ou de maïs vides. Mais ce qui compte pour moi, c’est d’assurer la survie de la mère et de l’enfant. » Fait savoir Loti.

Le 11 février 2025, après l’ultimatum imposé par les autorités de facto du M23, le camp de Lushagala a été démantelé. Les clientes de Loti  ont été pour la plupart forcées de regagner leurs villages d’origine ou de trouver refuge dans des  familles d'accueil, sans assistance médicale.

Après avoir travaillé dans des conditions extrêmes au camp de Lushagala, Loti a dû s’adapter à un nouveau cadre : l’Hôpital Général de Référence de Virunga l’une des structures sanitaires où les sages-femmes humanitaires ont été déployés afin de poursuivre les services de santé sexuelle. Mais son engagement est resté le même.

Au-delà des soins cliniques, Loti  sensibilise

Mielor sensibilise les femmes retournées
Loti Mielor sensibilise les femmes retournées

Après le démantèlement du camp de Lushagala, Loti Kubuya Mielor a été affecté à l’Hôpital Général de Référence de Virunga dans le cadre du  projet « Prévention et réponse intégrées à la violence basée sur le genre (VBG) et à la santé sexuelle et reproductive (SSR) pour les populations vulnérables touchées par la crise humanitaire complexe dans les provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et de l'Ituri, en République démocratique du Congo », financé par le Bureau de la Commission européenne à la Protection Civile et Opérations d'Aide Humanitaire Européennes (ECHO), où il exerce comme chef d’équipe des sages-femmes. Dans cet établissement, il fait face à de nouveaux défis, mais garde la même mission : garantir des accouchements sécurisés et défendre les droits des femmes. L’afflux constant de femmes déplacées en état critique, les jeunes filles enceintes victimes de violences sexuelles et la persistance des tabous autour de la contraception et de la santé sexuelle compliquent la prise en charge. Mais Loti s’impose comme un repère rassurant pour ces femmes qui, autrefois réticentes à consulter un homme, se tournent désormais vers lui avec confiance.

Au-delà des soins, Loti est un militant. En tant que Secrétaire Rapporteur Provincial du Syndicat National des Sages-Femmes du Congo (SYNASAFCO), il défend les droits des sages-femmes et sensibilise les communautés sur l’importance de consulter les services des soins obstétriques. Il est également formé à la prise en charge des survivantes de violences sexuelles, un enjeu majeur dans un contexte où ces violences sont souvent utilisées comme pratique par les hommes en armes.

L’engagement de Loti a été renforcé grâce au soutien de UNFPA, qui joue un rôle clé dans la formation des sages-femmes et l’extension des services de santé maternelle et reproductive. À travers des programmes de renforcement des capacités, il a acquis des compétences avancées en gestion des urgences obstétricales, en soins post-partum et en prise en charge des survivantes de violences sexuelles. Son travail dans les cliniques mobiles déployées avec l’appui de UNFPA a permis à des femmes vulnérables, notamment dans les camps de déplacés, d’accéder à des consultations prénatales, à des accouchements sécurisés et à des services de planification familiale, réduisant ainsi le risque de décès maternels.