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Mwayonimana à gauche et Issaka à droite, ces deux mignons garçons sont nés il y a deux semaines au Centre de Santé de Rutshuru dans le territoire de Rutshuru en République Démocratique du Congo (RDC). Nous sommes à 75 Km au nord de la ville de Goma, Province du Nord Kivu. Leur maman, Wimana Rebecca, est déplacée de guerre. Elle vit dans un camp de déplacés au site stade Tata Mwami Rugabo II, un site qui a accueilli des déplacés depuis le mois de mai dernier à la suite des affrontements armés qui ont opposé les militaires des Forces armées de la RDC (FARDC) aux rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) dans le groupement de Jomba, en Territoire de Rutshuru. Ces affrontements ont poussé Wimana Rebecca comme une grande partie de la population civile au déplacement vers les différents Groupements du territoire de Rutshuru et vers la frontière avec l’Ouganda et le Rwanda.

 

Lorsque j’ai entendu les bombardements, nous avons quitté la maison avec les enfants pour aller nous cacher dans la brousse. Le soir, quand il y eu accalmie, nous sommes rentrés et nous avons trouvé que notre maison était incendiée » s’est confiée Rebecca.

 

Enceinte de 7 mois lors de ces affrontements, et en l’absence de son mari qui est actuellement à Kampala pour des raisons de « débrouillardise », Wimana Rebecca a dû traverser un calvaire lors de sa fuite.

Je n’avais aucun espoir parce que j'ai tout perdu quand ma maison a été incendiée. Nous avons quitté Jomba alors que j'étais enceinte de 7 mois pour venir nous installer ici à Rutshuru avec mes enfants » ajoute-t-elle.


Un camp de déplacés érigé dans l'enceinte du stade Tata Mwami Ndeze Rugabo II à Rutshuru

Cette mère d’une trentaine d’année révolue a actuellement 7 enfants qui sont arrivés à Rutshuru après avoir parcouru à pied 7 kilomètres de route. Fatigués, affamés, dépourvu de tout et sans espoir de trouver un bon refuge, ils se sont installés dans le camp de déplacés du site stade Tata Mwami Rugabo II en attendant d’avoir d’autres possibilités.

 

Quelques semaines plus tard, des jumeaux, Mwayonimana et Issaka Kwiseka voient le jour au Centre de Santé de Rutshuru. Un centre appuyé par UNFPA dans le cadre de la réponse d’urgence en santé de la reproduction (SR), prévention et réponse aux violences basées sur le genre (VBG) et exploitations et abus sexuels (EAS) en faveur des personnes affectées par la crise humanitaire dans le Rutshuru en province du Nord-Kivu.


La sage-femme de l’UNFPA Mme Fyfy Omoy en entretien avec les infirmiers au centre de santé de Rutshuru

Fournir des services vitaux intégrés de santé sexuelle et reproductive

 

Selon le Chargé de Programme Santé de la Reproduction et planification familiale, le Dr Patrick LIBONGA, UNFPA appui 5 formations sanitaires et un hôpital général de référence (HGR) en subvention et approvisionnement en Kits de santé de la reproduction (SR) pour 10.000 personnes vulnérables pour couvrir une période de 3 mois dans le cadre de la réponse à la crise M23. Par ailleurs, 950 kits de dignité ont également été distribués aux survivantes des violences sexuelles, aux femmes visiblement enceintes et allaitantes afin d’offrir des soins gratuits aux déplacés, retournés et communautés d’accueil dans les zones de santé de Rutshuru et de Rwanguba.

 

Comme déplacée de guerre, Wimana Rebecca a été assistée lors de son accouchement par un personnel qualifié pour éviter un décès maternel de trop, et les nouveaux nés ont reçu des soins essentiels à la naissance. Un kit d’accouchement individuel lui a été remis. Un ouf de soulagement pour la mère des jumeaux que nous avons rencontré dans le camp.

 

Je suis vraiment très contente et je dis merci à Dieu parce que j’ai accouché sans aucun frais et sans problème grâce aux personnels soignants qui m’ont bien encadré et soigné ». Et de poursuivre « Mais, la grande difficulté, c’est de trouver de quoi nourrir toute cette famille et vêtir ces bébés qui sont encore nus à part ces deux morceaux de pagne que j’ai divisés pour les couvrir » a indiqué Wimana Rebecca.

 

Celle qu’on appel desormais « Nyabadeux » qui veux dire en français mère de jumeaux, a été sensibilisée sur les méthodes de contraception modernes pour la planification familiale, sur la prévention aux exploitations et abus sexuels (PSEA) et violences basées sur le genre (VBG) par la sage-femme Humanitaire de l’UNFPA Mme Fyfy Omoy.

 


La sage-femme de l’UNFPA Mme Fyfy Omoy sensibilise la mère des jumeau sur la planification familiale, la PSEA et le VBG

Des structures sanitaires affectées par la crise

 

Depuis le début de la crise du M23 en mars dernier, les structures sanitaires de la zone de santé de Rutshuru et de Rwanguba sont débordées suite aux nombreux mouvements de populations dont le nombre est estimé à 33.204 ménages d’environ 166.020 personnes déplacés internes répartis dans le Territoire de Rutshuru, parmi lesquelles plusieurs femmes enceintes et des enfants selon un rapport de mission d’évaluations multisectorielles conduite par OCHA en avril 2022.

 

Le Centre de Santé de Rutshuru à lui seul est passé de 73 accouchements dirigés par mois, à 150 accouchements alors que la structure n’a pas une grande capacité d'accueil selon l’Infirmier Titulaire Jean de Dieu Bakuru.

 

La capacité d’accueil de notre structure est devenue insuffisante de telle sorte que nous commençons même à référer les femmes qui n’ont pas de grossesse à haut risque de peur de ne pas manquer où les mettre après accouchement. Pour la consultation prénatale par exemple, on recevait 37 à 40 femmes mais maintenant nous arrivons jusqu’à 197 femmes. D’où l’urgence de sensibilisation sur la planification familiale » a alerté Jean de Dieu Bakuru.

 

Notons que dans le groupement de Jomba, outre les maisons d’habitation et écoles incendiées et pillées lors des affrontements, plusieurs formations sanitaires ont été systématiquement pillées et détruites.

... les Centre de Santé Rutsiro et celui de Rubavu, qui venaient à peine d’être approvisionnés en kits Santé de la Reproduction par UNFPA » a souligné Dr Patrick LIBONGA.

 

Pour la société civile locale citée par OCHA, au moins huit structures sanitaires sur les 21 que compte la Zone de Santé de Rwanguba, ont été pillées. C’est le cas de Bugusa et de Chengerero qui ont été vidées de leurs stocks de médicaments et équipements médicaux. La cantine scolaire de l’E.P Chengerero aurait été aussi vidée de tout son stock de vivres.

 

Ainsi cette situation a affecté plusieurs autres secteurs comme l’éducation, le Wash, la protection, la sécurité alimentaire, la nutrition et les abris etc, dans les territoires de Rutshuru et Nyiragongo. Le plan de réponse humanitaire élaboré par la Coordination opérationnelle humanitaire provinciale (COHP) Nord-Kivu en juin 2022 a ciblé plus de 151 000 personnes parmi les 313 000 dans le besoin (dont 149 000 personnes déplacées); pour un budget global d’environ 35,9 millions de dollars américains (avec un gap actuel de 17 millions). Spécifiquement dans le secteur de la santé, 4 780 personnes ont été ciblé pour un budget global de 1 095 720 dollars américains (un gap d’environ 547 610 dollars américains restent à combler dans ce secteur) avec un accent particulier sur la santé sexuelle et reproductive ainsi que la prise en charge holistique des cas de VBG et PSEA.