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En 2019 alors qu’ils étaient encore fiancés, Ngoa Bindu avait envoyé sa prétendue bien-aimée à Mutara, un village voisin de Buabo, pour s’approvisionner en huile de palme. Chemin faisant, Samantha avait été violée sur son chemin de retour.

 

Depuis lors, Ngoa Bindu avait décidé de prendre Samantha en mariage pour bien s’occuper d’elle malgré la dette du reste de la dot qu’il avait.  Le jeune homme finit par obtenir l’aval de sa belle-famille et récupère Samantha et forment un foyer qui aujourd’hui a 3 enfants et cohabitent ensemble pour le meilleur et pour le pire.

 

Survivante de viol à 19 ans, Samantha est entrée dans le circuit de prise en charge holistique au centre de santé Buabo en 2021, suite aux activités d’information et de sensibilisation mises en oeuvre par l’ONG HOPE IN ACTION appuyée par UNFPA grâce au projet de « Réponse multisectorielle aux besoins vitaux en soins de santé primaires, santé reproductive et violences basées sur le genre en provinces du Nord-Kivu » financé par le Fonds Humanitaire en RDC.

 

Outre la prise en charge médicale, psychosociale et réinsertion socio-économique assurée, elle a également bénéficié gratuitement de soins médicaux lors de son accouchement en juin 2022.

 

J’étais au centre de santé ce jour-là quand ma femme a accouché. J’avoue que je n’avais jamais imaginé avoir deux bébés au même moment. La sage-femme m’avait aspergé de la farine sur la tête et m’a appelé “Shabadeux”. J'étais stupéfait et en même temps très heureux. Depuis lors, je me suis réellement senti “ Père” ». a indiqué le père des jumeaux.


Samantha, la femme de Ngoa Bindu avec  ses  bébés jumeaux à leur domicile à Buabo

 

Devenu père de jumeaux à 22 ans, Shabadeux nous a parlé de sa vie de couple avec Samantha sans honte ni complexe et reconnaît néanmoins que le chemin a été éprouvant avant d'en arriver là.

 

 J’ai vite compris que ce n’était pas de sa faute et je continue à l’accompagner dans beaucoup d’activités au centre de santé de Buabo et apporter tout mon soutien pour l’aider à surmonter les faits.» a lâché le jeune homme.

 

Pour lui, parfois, la vie est pleine de surprises, il s’adapte dans son nouveau rôle et aide sa femme dans son quotidien avec leurs 3 enfants.

Pour moi, devenir papa, c’est aussi m’occuper d’un bébé lorsque ma femme a un autre, apporter des couches, dormir tard la nuit et me réveiller très tôt pour aller acheter et vendre ma marchandise pour la survie de la famille » a-t-il poursuivi.

 

Un modèle de masculinité positive

 

Nous avons rencontré Shabadeux de son retour du marché à Masisi centre où il écoule souvent sa marchandise (huile de palme), en plus de l'élevage des chèvres qu’il fait à Buabo.

 

Avant, on achetait un seul bidon d’huile à Mutara à quelques 12 Km du village et on vendait ici à Buabo. Mais depuis que nous avons un grand capital grâce à UNFPA et son partenaire HOPE IN ACTION, nous parvenons à nous approvisionner avec 5 bidons d’huile que j’apporte à Masisi pour vendre en gros, et cela améliore progressivement le revenu de la famille » a indiqué Ngowa Bindu.

 

Pour bien s’occuper des enfants et de sa femme, Shabadeux pratique aussi l’élevage des chèvres. Avant de se réveiller pour aller à Mutara, il s’occupe des chèvres le matin et le soir quand il rentre du marché. Depuis la naissance de ces bébés, la vie de papa est totalement transformée.

 

Ces jumeaux ont transformé ma vie et cela m’aide à prendre conscience du bonheur d’avoir des enfants et de devenir réellement papa. C’est quand ils sont nés que je me suis remis en question, et j'ai pris mes responsabilités en mains » a précisé le mari de Samantha.

 

Zéro cas de VBG, c’est encore possible


Samantha, une survivante mère des jumeaux, bénéficiaire de la prise en charge holistique de cas de VBG

 

En effet, les crises humanitaires successives qui ont émaillé la vie des populations civiles à l’Est de la RDC n’ont pas eu seulement comme conséquences les déplacements massifs des populations mais elles ont causés aussi des pertes énormes en vie humaines, et plusieurs milliers de femmes, jeunes et petites filles sont victimes des violences basées sur le genre.

 

Ces femmes, jeunes et petites filles subissent au quotidien, parfois au nom de certaines coutumes, des violences, des pratiques sociales et domestiques sexistes, de harcèlement sexuel dans leurs milieux. Voilà pourquoi, UNFPA a réuni du 3 au 4 novembre 2022 à Lubumbashi des chefs traditionnels et religieux des 26 provinces de la RDC dans un forum national afin de mettre fin aux violences basées sur le genre.

 

Il convient de noter qu’en RDC, UNFPA poursuit la lutte contre les violences basées sur le genre et autres pratiques néfastes telles que le mariage forcé, en vue de réaliser « zéro cas de VBG » l’un de ses trois résultats transformateurs. Cette agence lead des Nations Unies sur les droits en santé sexuelle et reproductive s'investit dans la réinsertion socio-économique de femmes et jeunes filles vulnérables comme Samantha et bien d’autres femmes dans son cas. UNFPA renforce leurs capacités avec la formation sur la création des activités génératrices de revenus afin de leur permettre de se reconstituer après un viol et d’affronter la vie en toute responsabilité.

 

Le parcours de vie de ce couple résilient est une preuve que l’on peut se reconstruire ensemble après le viol d’un conjoint. Un vrai modèle de masculinité positive, signale-t-on.