La salle de réunion de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, FAO, bureau terrain de Kikwit est agitée. Entre l’impression et photocopies des documents, les occupants de la salle s’activent à vérifier et ranger des sacs de voyage pour ce qui s’apparente à une mission de terrain.
Ce sont des enquêteurs qui se préparent à descendre à Gungu. C’est un des territoires de la province du Kwilu où nous menons différentes activités dans le cadre du Projet Multisectoriel de Nutrition Santé, PMNS. On va y lancer des enquêtes pour renseigner sur les besoins réels en intrants agricoles pour contribuer à la lutte contre la faim dans cette zone de santé»,
explique Patience Kiyana, superviseur des enquêteurs auprès de FAO-Kwilu.
Préparation visiblement terminée, la quinzaine d’enquêteurs s’installe convenablement au tour de l’immense table placée au milieu de la salle, attendant apparemment une dernière communication. C’est une dame qui fait son entrée dans la salle portant des dépliants et boîtes à images. Elle, c’est Louise Maimona Mabila, Analyste VBG chez UNFPA basée à Kikwit : « Dans quelques heures, vous allez sur terrain pour des enquêtes. Vous serez donc en contact avec les populations locales. Il est important qu’on puisse partager avec vous les notions élémentaires sur l’exploitation et abus sexuels ainsi que le harcèlement sexuel (EAS/HS), explique-t-elle à l’assistance avant d’ajouter, l’objectif est de contribuer à la protection surtout des femmes et filles contre les violences basées sur le genre, l’exploitation, abus et harcèlement sexuels ».
Une routine qui protège et redonne la dignité aux femmes
Durant la séance de sensibilisation d’environ une heure, les enquêteurs appris sur les concepts basiques de l’EAS/HS, les mécanismes de gestion des plaintes, les voies de signalement ainsi que les sanctions réservées aux auteurs.
Le briefing organisé à l’intention des enquêteurs de FAO est l’une de nombreuses séances de sensibilisation sur l’EAS/HS que mène UNFPA dans la province du Kwilu.
Le pouvoir d’achat est faible dans nos villages. Nous rappelons à aux partenaires qui veulent descendre sur terrain qu’ils peuvent s’exposer aux EAS/HS s’ils utilisaient leur pouvoir à la fois économique ou hiérarchique dans la prestation des services en échanges des faveurs sexuels »,
explique Patience Kiyana, superviseur des enquêteurs chez FAO. Enfin, les enquêteurs ont signé le code de bonne conduite de l’UG – PDSS.
Pour Suzanne Banikange, nutritionniste à la zone de santé Kikwit Sud et qui fait partie de l’équipe d’enquêteurs, il s’agit d’une importante activité de rappel afin que chacun soit devant ses propres responsabilités :
C’est capital d’avoir avant chaque descente ces genres d’informations. Nous remercions UNFPA pour cette initiative d’apprendre les notions sur l’EAS/HS aux acteurs de terrain. Car auparavant, certains ont profité de leur position et du peu d’argent qu’ils avaient pour obtenir des avantages sexuels auprès des jeunes filles et femmes» conclu-t-elle.
Des défis et de l’espoir
Depuis Juillet 2022, la province de Kwilu est bénéficiaire du projet « Prévention et Réponse Aux violences basées sur le genre (VBG), y compris l’Exploitation et les Abus Sexuels (EAS) et les Harcèlement Sexuels (HS) » mis en œuvre par UNFPA avec l’accompagnement de l’Unité de Gestion du Programme de Développement du Système de Santé ( UG-PDSS) sous financement de la Banque Mondiale.
Il s’agit d’un programme implémenté dans 20 provinces et vise à créer un environnement favorable à la mise en œuvre des projets PMNS, PDSS, Covid-19 et REDISSE, financés par la Banque Mondiale, tout en sécurisant les parties vulnérables, bénéficiaires des interventions, ce qui rencontre l’un des trois résultats transformateurs de UNFPA, à savoir : zéro cas des violences basées sur le Genre.
Dans le Kwilu, le projet a appuyé des formations et sensibilisations des agents et cadres étatiques, des humanitaires, des agents de santé ainsi que les populations bénéficiaires du projet qui sont sensibilisées à travers les relais communautaires ( RECO) et les radios.
« Le principal défi, on s’y attendait, c’est d’emmener les victimes à dénoncer. Les questions liées à la sexualité, surtout celles liées aux violences sexuelles sont encore considérées comme tabou et cela pousse certaines survivants à vivre dans le silence. Mais avec les sensibilisations que nous avons démarrées, nous espérons pouvoir délier les langues afin que les auteurs répondent de leur crime » note Louise Maimona.