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Pendant plus de trois ans, Dame Espérance a semblé perdre l’espoir en la vie. L’avenir s’est brutalement assombri devant elle lorsque les médecins lui ont annoncé qu’elle avait en elle le virus d’Ebola et qu’elle ne pouvait plus retourner chez elle et voir son garçon de 11 mois avant sa mise en quarantaine.

Elle avait connaissance de cette maladie par les médias et n’aurait jamais imaginé qu’en tant qu’épouse d’un médecin, elle pouvait en souffrir elle-même. « Pendant longtemps, j’ai cru que c’était une maladie des pauvres, des gens sans hygiène ou ceux qui consomment la viande de brousse », confia-t-elle à l’équipe de UNFPA. Elle ajoute : « J’ai été dévastée par la suite, de savoir que mon mari en souffrait déjà ». En réalité, avant la déclaration de l’épidémie le 1er Aout 2018, celui-ci avait déjà contracté la maladie et, avec l’aide de ses collègues du Centre de Santé de Référence de Mangodomu, avait tenté d’en maitriser les symptômes qui se résumaient à la céphalée, la fatigue, la fièvre, l’angine. Avec l’apparition des maux de ventre, il a vite décidé de rejoindre son épouse qui habitait en ville de Beni, hospitalisé dans une clinique durant une semaine sans succès. Sur les conseils de la famille, après que la famille ait appris la  dégradation de l’état de santé  de mon mari,  il a été transféré dans le secteur d’Oïcha (Hôpital Général de Référence d’Oïcha). Naturellement, Madame Espérance courut à son chevet pour constater le désespoir du malade qui aurait préféré mourir au milieu de sa famille dans son Oïcha natal.

« SI JE N’AVAIS PAS ETE CONTAMINEE, IL SERAIT MORT PAR MECONNAISSANCE »


Dame Espérance à la crèche de l’HGR de Beni

Les médecins de l’hôpital de général de référence d’Oïcha ont prélevé le sang de mon époux et l’envoyer dans une clinique à Beni pour examens spécialisés. « A la sortie de cet hôpital, les médecins nous ont dit que mon époux a été intoxiqué ». Pendant la convalescence de son époux, Espérance fut saisie d’une fièvre violente, des céphalées et d’une douleur au niveau des flancs. Elle a fait une consultation à l’Hôpital Général de Oïcha .En ce moment, on avait déjà annoncé l’épidémie dans la province. Son test s’avère positif et mis la puce à l’oreille de l’équipe des enquêteurs qui ont fini par retrouver son mari agonisant dans sa cachette de Oïcha.

Espérance est catégorique « Si je n’avais pas été contaminée, mon mari serait mort d’une maladie inconnue » s’exclama-t-elle car entretemps, au moment où le médecin était sorti de l’hôpital (à domicile pour soigner la prétendue intoxication), le secteur de Mangina était déjà devenu l’épicentre de la maladie et plus de dizaine de ses collègues soignants avaient été déjà déclarés positifs.

« CETTE MALADIE M’A LAISSE UN CHOC PSYCHOLOGIQUE »

 


La  sortie du couple du Centre des traitement Ebola(CTE) de Beni

Le couple fut pris en charge dans le Centre de Traitement de Ebola(CTE) de Béni. Après guérison, Espérance fut embauchée comme berceuse dans la crèche improvisée pour garder les bébés dont les mamans étaient gardées au CTE pour les soins, tandis que son mari fut affecté comme médecin traitant dans le même CTE.

Si ce dernier a pu résister au traumatisme ambiant, Espérance, elle a souffert des violents tourments et n’a pas pu supporter la stigmatisation dont était victime son foyer. Elle a dû être admise pendant un mois au service de neuropsychiatrie de l’hôpital de Beni avant de compléter sa mission de berceuse jusqu’à la fin de l’épidémie le 25 juin 2020. Entre-temps le couple a bénéficié d’un accompagnement psycho-médical de septembre 2018 à novembre 2019

« NOUS ATTENDONS L’HEURE DE DIEU ! »

Espérance confie à l’équipe de UNFPA que « j’ai déjà connu deux tentatives infructueuses. La dernière était une grossesse molaire qui n’a pas de lien avec la survivance à Ebola », mais Espérance s’en remet à la providence : « Nous attendons l’heure de Dieu ». Contrairement à ce couple, beaucoup de survivants ont déjà donné naissance à des enfants dont les allaitements sont surveillés par le corps médical. Au sein de l’Association des Vainqueurs(survivants de la MVE) de la province du Nord Kivu, on dénombre déjà plus de vingt naissances à risque et l’UNFPA et les autres agences des Nations Unies s’emploient à les encourager à pratiquer la planification familiale à travers l’utilisation appropriée des produits contraceptifs, dont le préservatif, étant donné qu’après guérison, le virus peut séjourner dans le corps humain à une durée variable pouvant, pour certains, rester plus de 500 jours encore. Pour Espérance, ce délai peut paraitre insoutenable pour les personnes de jeunes âges, c’est pourquoi le foyer s’’est engagé aux côtés de l’UNFPA pour sensibiliser la jeunesse aux risques liés à la non observance des prescriptions d’utilisation des préservatifs par les partenaires ayant sur vécu à la maladie.

       Par Mamie Gabrielle Masaki, Dr  Jean-Paul Makay et Theophane Patinvoh