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Mon corps m’appartient : revendiquer le droit à l’autonomie et à l’autodétermination

 

Chaque année le Fonds des Nations Unies pour la Population, UNFPA invite la communauté internationale à réfléchir sur une thématique majeure en relation avec les questions de population et développement de l’heure à travers la célébration de la Journée Mondiale de la Population, le 11 Juillet, puis en éditant un rapport spécifique dénommé Rapport sur l’état de la Population Mondiale. L’édition 2021 du Rapport porte sur « Mon corps m’appartient : revendiquer le droit à l’autonomie et à l’autodétermination » et est consacrée à l’autonomie corporelle, la santé et les droits sexuels dans le monde.

 

Le Fonds des Nations Unies pour la Population attire l’attention de la Communauté internationale une fois encore pour poursuivre et renforcer les efforts pour mettre fin aux pratiques néfastes et violences sexuelles en cette période d’adversité, où le monde est confronté à une pandémie sans précédent.

En effet, combien de femmes et de filles peuvent librement proclamer ce principe ?

 

Chacune et chacun a le droit de disposer de son corps et doit être en mesure de faire ses propres choix en conséquence, avec le soutien de celles et ceux qui l’entourent, et de la société en général. Pourtant, des millions de personnes sont privées de leurs droits, dont celui de refuser d’avoir des relations sexuelles, celui de choisir leur conjoint(e) ou encore celui de décider du moment pour avoir un enfant. Nombreuses sont celles qui se voient refuser ce droit en raison de leur origine ethnique, de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur âge ou de leur éventuel handicap.

 

Leur corps ne leur appartient pas


Des milliers de filles au mariage précoce

Priver les femmes et les filles du droit de disposer de leur corps est inacceptable. Ces pratiques encouragent et renforcent les inégalités et la violence issues de la discrimination sexiste.

Mais quand les femmes et les filles sont libres de faire les choix les plus fondamentaux concernant leur corps, elles gagnent non seulement en autonomie, mais bénéficient aussi de meilleures conditions en matière de santé et d’éducation, de revenus et de sécurité. Il en résulte un monde plus juste et plus propice au bien‑être humain, ce qui profite à chacune et chacun d’entre nous.

L’UNFPA soutient les femmes et les filles dans la revendication de leurs droits et de leurs choix, et ce tout au long de leur vie. Depuis 1994, les programmes de l’UNFPA sont guidés par le Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement (CIPD), qui a fait de l’indépendance des femmes et de leur autonomisation le socle d’une action mondiale en faveur d’un progrès social et économique durable. L’UNFPA soutient également toutes celles et tous ceux qui sont régulièrement privés de la liberté de prendre des décisions autonomes au sujet de corps : les personnes d’orientations sexuelles et d’identités de genre différentes, les personnes handicapées et celles issues de minorités ethniques et raciales.

Grâce à son rôle moteur au sein de la nouvelle coalition d’action du Forum Génération Égalité concernant le droit à disposer de son corps et la santé ainsi que les droits sexuels et reproductifs, et à travers la présente édition de l’État de la population mondiale, l’UNFPA entend démontrer pourquoi le droit à l’autonomie corporelle est un droit universel qui doit être honoré. Ce rapport révèle les nombreux manquements observés s’agissant du droit à l’autonomie corporelle, dont beaucoup se sont accentués sous la pression de la pandémie de COVID‑19. À l’heure actuelle, par exemple, un nombre record de femmes et de filles sont exposées à la violence basée sur le genre et à des pratiques néfastes telles que le mariage précoce.


Entretien avec une survivante pour une prise en charge médicale

Le rapport présente également les solutions qui sont déjà à portée de main, tout en soulignant que le succès exige bien plus qu’une série de projets ou de services disparates, aussi importants soient‑ils. La réalisation de progrès tangibles et durables dépend en grande partie de l’élimination des inégalités de genre et de toute forme de discrimination, ainsi que de la transformation des structures sociales et économiques qui les perpétuent.

 

À ce titre, les hommes doivent se poser en alliés. Ils doivent être bien plus nombreux à se détacher des schémas favorisant les privilèges et la domination qui nuisent gravement à l’autonomie corporelle, et s’orienter vers des modes de vie plus justes et plus harmonieux qui seront bénéfiques à toutes et tous. Des mesures idoines doivent être prises pour lutter contre les discriminations, quelles que soient les circonstances où elles sévissent. Parce que la complaisance est synonyme de complicité.

La République Démocratique du Congo doit poursuivre ses efforts visant à maitriser la croissance démographique pour lutter efficacement contre la pauvreté et assurer la croissance inclusive et l’émergence du pays, résultat visionnaire du Plan National Stratégique de Développement (PNSD). Il est à noter également que malgré l’adoption de textes légaux et réglementaires en RDC, les inégalités liées au genre et à la violence basée sur le genre constitue des défis majeurs. Environ 107 592 cas de violence sexiste ont été signalés dans la base de données nationale sur la violence sexiste de 2013 à 2017. OCHA estime (HRP 2017-2019) qu’environ 12,1 millions de personnes auront besoin d’une protection et d’une assistance humanitaires en 2019, dont 4 768 400 femmes et filles sont exposées à de multiples formes de violence sexiste et 60 000 à des actes de violence sexuelle.

Selon les résultats du MICS 2017-2018, 23,2% des femmes de 15-49 ans se sont senties discriminées ou harcelées au cours des douze derniers mois pour diverses raisons (genre, orientation sexuelle, religion/croyance, etc.). D’autres instruments d’évaluation de l’égalité des sexes dans le pays confirment la situation préoccupante quant à l’intégrité physique des femmes et des filles, l’accès limité aux ressources et services ainsi que la restriction des libertés civiles des femmes. Les inégalités entre les sexes sont particulièrement présentes dans l’ensemble des domaines économiques, politiques, sociaux et culturels.

C’est le lieu d’apprécier à leur juste valeur deux initiatives heureuses de son Excellence Monsieur le Président de la République Démocratique du Congo, (i) la première portant sur la gratuité de l’éducation primaire et (ii) la deuxième portant la hausse remarquable de la représentation des femmes au sein du nouveau Gouvernement de près de 30%.

 

Ces initiatives doivent être renforcées car il n'existe aucun instrument de développement plus efficace que l'éducation des filles. Et l’étude sur la pauvreté en RDC conduite par la Banque Mondiale nous montre clairement que plus de 30% de la variabilité de la pauvreté s’explique par le niveau d’éducation des filles. Il s’agit donc d’un programme structurant.

 

Dans son avant-propos au rapport, Dr Natalia Kanem, Secrétaire Générale Adjointe des Nations Unies et Directrice Exécutive de UNFPA a écrit :

Nos pays et nos communautés ne pourront s’épanouir que lorsque chaque individu aura le pouvoir de prendre des décisions au sujet de son corps et de décider de son propre avenir. Réclamons donc le droit à ce que chacune et chacun puisse prendre des décisions ayant trait à son propre corps et soit libre de faire des choix éclairés. C’est ce que nous voulons toutes et tous. C’est ce que nous méritons toutes et tous. C’est l’un des fondements de l’humanité que nous partageons et nous ne devons jamais perdre de vue les enjeux universels qui y sont inexorablement associés ».

 

Préparé par Professeur Pierre KLISSOU

Démographe, Conseiller Technique Principal du Recensement